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Le ciment des rêves, l’univers sculpté de Gabriel Albert

Mai > décembre 2021
Commissariat : Stéphanie Birembaut (Musée Cécile Sabourdy) & la Région Nouvelle-Aquitaine, propriétaire du Jardin de Gabriel.

En invitant Gabriel Albert à Vicq-sur-Breuilh, le musée poursuit son exploration des pratiques atypiques et expose pour la première fois l’œuvre d’un « habitant-paysagiste », auteur qui transforme son environnement quotidien en création totale, personnelle et poétique.

Visite du Jardin de Gabriel par l’équipe du musée Cécile Sabourdy, en 2021


Les + de l’exposition

  • Découvrez l’atelier de Gabriel Albert « dans son jus » à travers les tentures et les éléments d’assemblages des sculptures.
  • Des inconnus, mais aussi des personnages célèbres ! Georges Brassens, Napoléon, de Gaulle… une sorte de musée Grévin en ciment.
  • Participez au Cluedo grandeur nature au milieu des sculptures pour résoudre une enquête : dates à retrouver dans l’onglet Saison culturelle.
Autoportrait en ciment de Gabriel Albert devant la reproduction de son atelier


Un « habitants-paysagiste » dans un musée

Gabriel Albert s’inscrit dans la longue liste des auteurs inclassables défendus par le Musée Cécile Sabourdy, mais avec lui, le Musée aborde un nouveau territoire du continent « Hors-les-Normes » : le territoire des « inspirés du bord des routes » et des « habitants-paysagistes ».

En 2019, à l’invitation de la Région Nouvelle-Aquitaine, l’équipe du Musée Cécile Sabourdy découvre le site et éprouve, comme tant d’autres, un effet de saisissement jubilatoire.

Des statues en ciment coloré réalisées par centaines, un auteur humble et autodidacte qui les met en scène avec audace dans son petit jardin : tout ici entre en résonance avec le champ d’exploration du Musée…

A la fin de sa vie, Gabriel se préoccupe du devenir de sa création. Alors qu’il a longtemps refusé le prêt de ses personnages pour des expositions, il songe désormais à un avenir muséal pour garantir leur protection :

« Peut-être qu’ils partiront dans un musée ou que l’on trouvera quelqu’un de sérieux pour les tenir d’aplomb si le terrain penche. »

Cette phrase lancée par Gabriel en 1990 fait germer trente ans plus tard l’idée d’une exposition qui mettrait en lumière un site et un artiste uniques, hors de leur terre d’attache. Si l’idée est séduisante, elle soulève aussi des questions d’ordre symbolique pour les deux partenaires du projet, le Musée Cécile Sabourdy et la Région Nouvelle-Aquitaine :

Comment témoigner d’une œuvre prolifique, foisonnante de quelques 400 statues, à travers une sélection resserrée de 44 sculptures ?
Comment rendre compte, intramuros, d’une œuvre pensée comme un ensemble végétalisé à ciel ouvert ?
Comment manier l’espace muséal pour accueillir une production qui ne lui est pas destinée ?

Autant de questions auxquelles tentent de répondre les commissaires d’exposition et une scénographie portée par un parcours visuel à la fois épuré et coloré, suggérant le jardin plutôt qu’il ne le montre.

Le jardin existe dans l’espace d’exposition grâce au travail graphique de Gaëlle Delahaye (Color my factory), qui habille les murs du musée de tentures dessinées évocatrices. Ce décor suspendu, très contemporain, est également un clin d’œil à la tradition de la tapisserie en Limousin.


Le menuisier qui se rêvait artiste, Gabriel Albert (1920-2000)

Photographie de Gabriel Albert devant ses créations, dans les années 1980
© Région Nouvelle-Aquitaine, Inventaire du patrimoine culturel / C. Rome · © Monuments historiques · © Collection particulière

Fils d’agriculteurs né en Saintonge en 1920, Gabriel est attiré dès son plus jeune âge par la sculpture. Pour gagner sa vie, il doit pourtant oublier cette passion et se faire tour-à-tour laitier, scieur de long et finalement menuisier, tout en tenant une station-essence…

A 65 ans, libéré des contraintes professionnelles, il réalise enfin son rêve d’enfant : pendant 20 ans, sans aucune formation artistique mais doué de ses mains depuis toujours, il crée sans relâche des centaines de statues en ciment peint, qu’il met en scène dans son jardin.

Entre 1969 et 1989, il produit 420 sculptures en ciment armé polychrome et les dispose dans son jardin. Livrées au regard des passants « en parade », elles occupent peu à peu tous les espaces disponibles, les côtés et l’arrière du terrain. Il imagine et réalise aussi un mobilier complet : socles et piédestaux, bancs et murets, poteaux supportant une treille de vigne… Le tout en ciment, formant une œuvre totale : le Jardin de Gabriel.

En 1989, à 85 ans, Gabriel tombe malade et se sent trop affaibli pour reprendre son activité de sculpteur. Pendant quelques années, il entretient son œuvre et fait visiter son jardin jusqu’à sa disparition en 2000, à l’âge de 95 ans.


Le jardin de Gabriel à Nantillé (17)

Visible depuis la route, le Jardin de Gabriel, au premier abord chaotique, témoigne en réalité d’une véritable maîtrise de l’espace.

En organisant son théâtre de personnages, d’animaux et de végétation, Gabriel conduit les pas des visiteurs mais aussi leur regard, qui se pose tour-à-tour sur les œuvres, les plantes et les éléments décoratifs. Le parcours de l’exposition fait écho à cette déambulation voulue par Gabriel Albert. De salle en salle, le visiteur bascule dans un monde onirique et original, où le temps semble suspendu.

Déplacées pour la première fois et à titre exceptionnel hors de leur écosystème, les sculptures mises en exposition nous apparaissent sous un jour nouveau, qui souligne leur intérêt esthétique.


Le saviez-vous ?

L’exposition ‘Le ciment des rêves’ emprunte son beau titre à un article consacré à quelques sites du sud-ouest de la France, dont le Jardin de Gabriel, par Bruno Montpied (revue Plein Chant n°44 – 1989).

L’auteur met au jour et défend inlassablement un art populaire et immédiat, volontiers excentrique, qui doit tout à l’intuition, l’invention, plutôt qu’à l’apprentissage.

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